Aider son prochain ? [PV July]

Marin venait de finir sa journée de travail. Il avait décidé d'aller se boire un petit verre au Chaudron Baveur. Cela lui permettait de voir un peu de gens différents. Bien qu'il fut arrivé il y avait déjà quelques temps, Marin n'avait jamais réussi à trouver des gens avec qui il pourrait s'accorder à part Higini ou Axel Kallyl. La solitude était compensée par Willy, son côté obscur qu'il avait fini par contrôler. L'animal à la vague forme de chat le suivait dans la rue. Il ne le quittait jamais vraiment. Et puis c'était une aide pour Marin. Les sens animaux de la bête repéraient des choses que Marin ne voyait pas.

Une odeur de linge propre se dégageait de Marin et son costume était resplendissant. Même si la mise était simple, les couleurs étaient plus vives que jamais. Le blanchisseur était sa propre publicité.

Il arriva près du bar. L'homme remarqua au passage une jeune femme de couleur qu'il trouva plutôt jolie. Ce n'était pas parce qu'il était seul qu'il était insensible, bien au contraire. Mais il secoua intérieurement la tête. Cette jolie femme ne voudrait sans doute jamais lui adresser la parole. Son oeil exercé remarqua tout de même que le linge de la jeune femme était plutôt défraîchi.

Marin arriva à son niveau et allait traverser la rue en même temps qu'elle quand un fiacre passa et les éclaboussa. Une tâche de boue s'étalait désormais sur son beau costume et la jeune femme n'était pas dans un meilleur état.

- Eh bien ! Ce n'est pas notre jour de chance on dirait. Je me présente, Marin Laveclair, blanchisseur. Si vous le désirez, je peux vous convier à ma boutique où nous pourrons remédier à ces petits ennuis vestimentaires. Je vous offre ce nettoyage de vêtement par solidarité pour une compagne d'infortune. A qui ai-je l'honneur ?

Marin fit son sourire le plus engageant, en espérant que la jeune femme n'allait pas se méprendre sur ses intentions.

July souriait en arpentant la rue, quelques pièces bien méritées dans sa poche, elle envisageait d'aller boire un verre, au Chaudron Baveur, s'amuser, pour une fois. Son enthousiasme faisait rage et saillait l'air oppressant de tout côté. Elle s'apprêtait à traverser la rue quand de la boue vint s'échouer sur sa robe autrefois blanche, déjà rapiécée de toute part, un fiacre venait en effet de provoquer cette attaque de saleté. L'éclaboussant elle, ainsi qu'un autre homme en costume élégant, qu'elle remarqua seulement quand il lui adressa bien sympathiquement la parole. La jeune femme lui adressa un sourire aimable et lui serra la main dans un élan de convivialité.

July Pittsbury, enchantée. Et vous, et bien vous êtes le blanchisseur de la blanchisserie Laveclaire si je ne m'abuses !

Elle observa sa tenue souillée par la boue et sourit encore. Ca ne la gânait pourtant guère, ayant l'habitude de voir ses vêtements en un état "pitoyable", mais il était véritable qu'elle ne serait pas contre un bon nettoyage de cette robe qu'elle affectionnait beaucoup.

Et bien écoutez, ce ne serait pas de refus mais je ne voudrais pas vous déranger !

Elle resta là, debout sur les pavés, ne sachant trop que faire, peut-être par peur de s'avancer au devant et de s'inviter sans politesse. Elle attendit donc que le blanchisseur lui réponde. Dans des gestes mélancoliques, elle tritura le tissu de son habits, immobile, seul le mouvement de ses doigts prouvant sa présence.

- July Pittsbury, enchantée. Et vous, et bien vous êtes le blanchisseur de la blanchisserie Laveclaire si je ne m'abuses !

Ainsi elle le connaissait ! Comme quoi, peut-être que les gens commençaient à l'identifier comme la solution à leurs tracas de blanchisserie ? Tout arrive même dans ce monde pourri. D'autant plus pourri par cette L.O.I. Si la situation empirait, il allait falloir que Marin songe à rentrer au pays même si pour cela il devait affronter son frère à nouveau. Depuis qu'il était parti, il avait trouvé un équilibre dans son déchirement interne.

La jeune femme souriait, comme si des vêtements sales lui étaient indifférents. Cela, Marin ne le comprenait guère. Néanmoins il pouvait tenter de la convaincre. Et puis, peut-être lui ferait-elle un peu de publicité, ce qui ne serait pas un mal. La situation de sa boutique était toujours précaire au niveau économique. Il gagnait tout juste de quoi survivre et ne pouvait compter que sur le petit magot qu'il avait mis de côté.

- Eh bien écoutez, ce ne serait pas de refus mais je ne voudrais pas vous déranger !

- Ah mais vous ne me dérangez absolument pas ! Vous savez, nettoyer une ou deux tenues ne fera pas grande différence pour moi. Et laisser une compagne d'infortune couverte de boue n'est pas du tout mon genre. Que deviendrait la réputation des français si nous nous permettions d'ignorer les belles demoiselles en détresse ? Venez donc avec moi, et nous verrons ce que nous pouvons faire pour vos vêtements. Je devrais également pouvoir leur redonner un peu de brillant, ces affaires ont l'air d'avoir subis pas mal d'aventures ces derniers temps.

Il avait dit ces derniers mots pour ne pas dire que les vêtements de July, puisque c'était son prénom, avait l'air passablement sales ! Ce disant, il souriait d'un air aimable. En bon commerçant, Marin était un homme affable.

En gentleman, le blanchisseur tendit son bras pour inviter la jeune femme à le prendre et à le suivre jusqu'à sa boutique qui ne se situait pas bien loin.

July prit simplement le bras du blanchisseur, son éducation lui ayant appris une approche naïve de quiconque, peut-être d'une grande imprudence certes mais ce qui en général, lui donnait un air vif, joyeux et purement sociable. Elle s'étonna presque imperceptiblement quand elle compris qu'il était français.

Mais quelle idiote !

Avec une telle classe et un tel respect des manières, l'idée aurait sûrement dû lui venir directement à l'esprit. Ils marchèrent donc dans la rue, pendant un court moment, l'air ne fut ponctué que par leurs respirations lentes et invisibles.

Vous êtes donc français ?

D'un air rêveur, elle prononça d'autres paroles, comme si son interlocuteur avait soudainement disparu.

La France... j'ai toujours rêvé de la visiter, je dois avouer que je ne connais guère plus que Londres et ses alentours... Enfin, je m'égare.

Machinalement, elle tourna à un angle, le chemin de Traverse étant un lieu où ses jours passaient paisiblement, ou non, chaque recoin lui en était connu dont la blanchisserie Laveclair et ces vêtements en ressortant toujours parfaitement propres et d'un éclat éclatant. A une reprise presque inutile, elle regarda encore cette robe vieillie par les abus bien trop fréquents de ce temps qui n'en finissait plus et l'imagina à nouveau blanche comme neige, s'arrachant un sourire délicat. Arrivés devant la vitrine du petit commerce, elle adressa encore une franche expression de bonheur à Marin, auquel elle était toujours attachée par le simple contact de leurs deux bras poliment enchaînés.

Encore une fois, je vous remercie infiniment, c'est très sympathique de votre part. Oh... Et puis-je vous tutoyer ?

Elle haussa un sourcil, ayant horreur, comme à l'accoutumée de ponctuer ses moindre mots de vous omniprésents, mais avec une homme d'une classe telle, il ne faudrait sans doute pas paraître impolie pour, qui sait, peut-être modeler une amitié sincère ?

Elle lui prit le bras ce qui étonna Marin qui leva intérieurement un sourcil. Lui faisait-elle du gringue ou était-ce simplement dans son caractère ? Le blanchisseur préféra opter pour la seconde option. A trop émettre d'avis sur les comportements des autres on en venait souvent à faire des erreurs fatales.

"- Vous êtes donc français ?"

- Bien sûr. Vous avez sans doute remarqué cette pointe d'accent qui fait que nous sommes si reconnaissables dans votre pays. C'est d'ailleurs parfois source de tristesse dans ce pays où la baguette fraiche est croustillante est pour ainsi dire inconnue. Heureusement que je connais un bon boulanger qui m'envoie son pain par magie pour un prix pas trop élevé. Sinon j'aurai probablement craqué depuis longtemps.

Ne vous en faites pas, nombre de gens ne connaissent pas mon pays. C'est pourtant un bien bel endroit où il y a beaucoup à voir et à goûter. Car comment visiter la France sans manger et boire ses spécialités ?

Mais vous savez mon savoir de l'Angleterre ne doit pas être tellement plus élevé que votre savoir de la France. Après tout, je n'ai visité que Londres et sa campagne ou presque si l'on y réfléchit bien.

Mais ils arrivaient à la blanchisserie quand Marin eut finit. Il fallait dire que le magasin n'était pas excessivement loin. Le blanchisseur sortait ses clefs et allait ouvrir la porte quand, encore accrochée à son bras, elle lui demanda de le tutoyer. La fille était jeune encore mais semblait tout de même relativement mâture.

- Eh bien... Oui pourquoi pas se tutoyer. Si vous... euh tu n'as pas peur de moi.

Sur ce il se dégagea gentiment de son bras pour ouvrir la porte.

- Allons, entre et nous allons voir ce que nous pouvons faire pour cette pauvre robe.

Elle rit immédiatement, peur de lui, mais quelle idée.

C'est que je ne suis pas très téméraire mais je t'assure que tu ne fais pas si peur !

July entra, puisqu'ils étaient enfin arrivés, le chemin ne l'avait pas gênée après tout, elle ne se fatiguait pas si facilement et puis la France l'intéressait, elle était toujours heureuse d'en apprendre plus, sur quelque sujet que ce soit.
Elle baissa les yeux quand il lui parla de sa robe, elle put ainsi se rendre une fois encore compte de la dépravation de son habit et lui adressa un signe de tête pour le remercier encore.
Elle continua, souriante.

Où vivais-tu en France ? Paris ?

Paris, on lui en avait fait tant de clichés qu'elle n'arrivait pas même à s'imaginer à quoi ressemblait réellement la ville, après tout, on ne pouvait connaître la prestance d'un endroit sans ne jamais l'avoir visité.
Son regard parcourut ensuite le commerce, propre, étincelant de propreté, il fallait le décrire ainsi.

Oh et oui, j'imagine qu'au niveau de la cuisine, il y a mieux que ce que je n'ai jamais put goûter ici !

Son enthousiasme faisait presque peur, avouons-le, une personne de nature gentille et aimable comme pouvait l'être la jeune femme, n'est jamais bien vu dans le monde actuel, car chacun est considéré comme un ennemi, comme celui qui cache son côté sombre en vue d'actions mauvaises.

Pourtant, il existe encore de ces gens à la personnalité pure et honnête, attachés aux véritable valeurs.